Le Chien des étoiles

Dimitri Rouchon-Borie

Dimitri Rouchon-Borie est né en 1977 à Nantes. Il est journaliste spécialisé dans la chronique judiciaire et le fait divers. Il est l’auteur de Au tribunal, chroniques judiciaires (La Manufacture de livres, 2018). Il est l'auteur au Tripode de Le Démon de la Colline aux Loups (lauréat de nombreux prix, dont le Prix des Inrockuptibles et le Prix Première de la RTBF, 2021), Ritournelle (2021), Fariboles (2022) et Le Chien des étoiles (2023).

Résumé

C’est la rencontre de trois destins qui nous est ici délivrée : Gio, 20 ans, a reçu un coup de tournevis sur le crâne et rentre de l’hôpital. Il retrouve Le Père et La Mère dans le mobil-home gitan qu’ils occupent. Des cauchemars en tête, mais avec une candeur de survivant, il fait la rencontre de Dolores, jeune fille inconnue de 16 ans, admirée et abusée pour sa beauté et « ses pêches ». Puis Gio côtoie et comprend l’orphelin Papillon, garçon muet qui a inventé son propre langage. Ces trois-là vont s’apprivoiser, se lier et s’enfuir dans un monde toujours plus hostile. Ils se heurtent à la violence mais cheminent ensemble dans un train de marchandises puis dans un ghetto où ils vont tenter de survivre chacun à leur manière. Avant un final d’une grande puissance.

Ce sont des enfants brisés en quête de rédemption, auxquels on s’attache résolument, grâce à la langue âpre et lumineuse de Dimitri Rouchon-Borie. Une cruauté du monde et une crudité des mots qui subliment cette fable tragique, dans laquelle on plonge, emportés dans la tourmente par l’empathie. On s’immerge dans les tréfonds de l’âme humaine, en espérant que l’amitié et la rédemption triompheront. Il n’en sera rien mais la lecture n’en sera que plus belle.

C’est le quatrième roman de Dimitri Rouchon-Borie, qui avait fait une entrée très remarquée en littérature avec Le Démon de la Colline aux loups en 2021. Et dans lequel il se positionnait déjà « du côté des amochés », porté peut-être par son activité de journaliste, écrivant notamment des chroniques judiciaires. L’auteur en a fait une force poétique, une ode aux marginaux : Le chien des étoiles, c’est le chien de la casse, le larbin brutal qui se tourne vers les étoiles pour assurer la protection de sa famille de cœur :

« - Non je ne connais pas les constellations et les grandes ourses. Mais tu peux t’amuser à trouver les formes que tu veux, personne n’ira te chercher des noises. Moi, je suis pas dans la science, je dois juste le rejoindre, le ciel. Je dois y aller Papillon, et pour tout te dire, parfois, j’y vais. » (p25)

«- Ecoutez bien ce que je vais vous dire parce que dans l’instant c’est la nuit qui parle, pas moi, et c’est une voix pure, alors je serai pas capable de la refaire ensuite. Je suis Gio et j’ai perdu la moitié de moi dans une bagarre pour rien, mais je n’en veux à personne parce que grâce à ça j’ai fait l’hôpital et j’ai rencontré là-bas quelque chose que j’explique pas, mais ça se passe la nuit. Tu sais Dolores, quand tu es venue je t’ai parlé des chouettes, bon, c’est comme ça, c’est mon univers maintenant. Et aujourd’hui j’ai vu comme vous êtes de leur famille vous aussi et je sais pas comment je vais faire ça, mais je vais devoir vous rendre à cette famille, qui est vraie, et qui trahit pas. Et je vais vous laver, chaque jour, pour sécher les larmes, et que plus personne ne gâche jamais cette beauté que vous êtes. » (p 35)

Et la beauté de ce roman est tout aussi pure, un diamant ciselé, dont l’alliance magique entre le fond et la forme ne peut qu’être saluée.

Magali Bouteiller-Chevance
Membre du jury du prix de la ville de Carhaix